Côte d’Ivoire : Un outil TIC pour détecter les maladies du manioc

Le Fonds compétitif pour l’innovation agricole durable (FCIAD) vient de lancer un programme baptisé « utilisation d’une application intelligente pour le diagnostic et la surveillance participative des maladies du manioc en Côte d’Ivoire ».

Nazaire Kouassi, le coordonnateur du programme explique que « le projet que nous conduisons permet aux producteurs de connaître les maladies. L’université de Pennsylvanie aux Etats-Unis a pris 11 600 photos de manioc sous divers angles afin d’entraîner l’appareil téléphonique à identifier les maladies. »

« Disponible sur Playstore, l’application est à télécharger par le producteur agricole. Dès la prise des photos, celles-ci sont acheminées vers le Cloud de l’université de Pennsylvanie pour l’identification et un retour d’information », ajoute cette même source.

Interrogé par SciDev.Net, l’intéressé révèle que le programme est en train d’acquérir un serveur afin d’avoir une certaine autonomie d’intervention grâce aux coordonnées GPS de l’endroit où la photo est prise.

Pour atteindre les résultats escomptés et garantir le succès du programme, ses promoteurs ont prévu d’inclure dans son processus les producteurs qui sont un maillon essentiel de la chaîne.

Pour cela, des sessions de formation ont eu lieu à Bouaké dans le centre-nord et à Jacqueville dans le Sud pour mettre à niveau 1 000 producteurs, des agents de l’Agence nationale d’appui au développement rural (Anader), des enseignants-chercheurs, etc. Question de leur apprendre à reconnaître les maladies du manioc.

« Les maladies virales sont de deux ordres : la maladie de la mosaïque qu’on retrouve couramment dans les champs en Côte d’Ivoire et la striure brune du manioc, fait savoir Nazaire Kouassi.

Selon ses explications, la striure brune n’est pas encore présente en Côte d’Ivoire et en Afrique de l’Ouest. Mais, dit-il, elle est déjà en Afrique de l’est et en Afrique centrale, plus précisément en République Démocratique du Congo (RDC).

Il ajoute que la maladie de la mosaïque connaît deux voies de transmission, à savoir par des mouches blanches et par le paysan lui-même. Celui-ci étant le principal vecteur de propagation de le pathologie à travers le planting de boutures malades.

En ce qui concerne les conséquences de ces maladies, « il faut signaler que la maladie de la mosaïque occasionne 40 à 70 % de perte de rendement tandis que la striure brune conduit à une perte de l’ordre de 90 à 100% de la production. Le manioc est bien produit mais inutilisable, même pour les animaux », précise Nazaire Kouassi.

Production

Aussi Marie-Jeanne Yao, présidente de la Plateforme d’innovation manioc de la région de Gbèkè (Bouaké) se réjouit-elle de l’initiative de cette application qui a été présentée aux producteurs agricoles de la région.

« Cet outil est le bienvenu pour nous. On n’a jamais imaginé que le manioc pouvait avoir des maladies. Nous avons constaté grâce aux chercheurs que ce que nous pensions être l’effet du changement climatique sur les boutures était en fait des maladies ; d’où la faible production au champ », soutient-elle.

Seulement, elle craint qu’un nombre important de producteurs de manioc en Côte d’Ivoire ne soit pas en mesure de s’offrir un smartphone, encore moins de l’utiliser…

Pour sa part, Simplice Yao Koffi, enseignant-chercheur associé au Centre de recherche et de développement de l’université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo dans le nord du pays affirme que « Si l’utilisation des smartphones est bien appliquée, cela va impacter le développement humain dans les zones rurales, principalement dans les régions centre et sud du pays. »

Car, justifie-t-il, « le manioc constitue l’une des principales cultures vivrières après l’igname. Mais, le constat par rapport à l’Asie est que la production est relativement faible avec 6 à 7 tonnes à l’hectare. Une faiblesse de la production liée à l’itinéraire technique et aux maladies qui s’attaquent aux plantes ».

Ainsi, pour le chercheur il faudrait penser à l’organisation du monde paysan en coopératives pour tisser des relations beaucoup plus professionnelles avec les structures d’encadrement, les potentiels acheteurs et les transformateurs ».

« Cela contribuerait à leur développement en termes de revenus et de transformation du milieu rural et à l’amélioration de l’habitat et du cadre de vie, à la mise en place d’équipements sociaux collectifs et à des équipements qui permettent à la communauté de vivre à l’aise », conclut Simplice Yao Koffi.

Accroître les revenus des producteurs agricoles tout en évitant que le producteur n’utilise des boutures malades pour d’autres champs constitue en effet l’objectif final de ce programme, tel que corrobore Nazaire Kouassi.